Affaire T-184/01
IMS Health, Inc.
contre
Commission des Communautés européennes
« Recours en annulation — Sursis à exécution puis abrogation de la décision attaquée en cours d’instance — Non-lieu à statuer »
Ordonnance du Tribunal (cinquième chambre) du 10 mars 2005
Sommaire de l’ordonnance
1. Recours en annulation — Recours dirigé contre une décision ayant fait l’objet successivement d’un sursis à exécution et d’une abrogation en cours d’instance — Disparition de tout effet juridique préjudiciable au requérant — Recours devenu sans objet — Non-lieu à statuer
(Art. 230 CE)
2. Procédure — Dépens — Non-lieu à statuer — Recours devenu sans objet du fait de l’abrogation de la décision attaquée — Modification des circonstances ayant présidé à l’adoption de cette décision — Prise en charge par chaque partie de ses propres dépens
(Règlement de procédure du Tribunal, art. 87, § 6)
1. La partie requérante peut conserver un intérêt à voir annuler un acte abrogé en cours d’instance si l’annulation de cet acte est susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques.
Lorsqu’il a été sursis à l’exécution de la décision attaquée, celle-ci n’a pas pu produire d’effets juridiques entre le moment où il a été sursis à son exécution et l’entrée en vigueur de la décision qui l’abroge, de sorte que, faute que subsistent des effets préjudiciables à la requérante pour la période précédant le sursis, le recours est devenu sans objet, avec la conséquence qu’il y a lieu de prononcer un non-lieu à statuer.
(cf. points 38, 40-41, 47, 49)
2. Dans un cas où la Commission a abrogé, en cours d’instance, une décision relative à une procédure d’application de l’article 82 CE en raison de la modification des circonstances ayant présidé à l’adoption de celle-ci, à savoir l’état de la concurrence, et où ni la décision d’abrogation ni les pièces versées au dossier ne permettent de considérer que la Commission a admis que cette décision était entachée d’illégalité au regard des griefs soulevés par la partie requérante, une juste appréciation des circonstances commande que chaque partie supporte ses propres dépens.
(cf. points 53, 55)
ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
10 mars 2005(1)
« Recours en annulation – Sursis à exécution puis abrogation de la décision attaquée en cours d'instance – Non-lieu à statuer »
Dans l'affaire T-184/01,
IMS Health, Inc., établie à Fairfield, Connecticut (États-Unis), représentée par MM. N. Levy, J. Temple-Lang, solicitors, et R. O'Donoghue, barrister,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. A. Whelan, É. Gippini Fournier et Mme F. Siredey-Garnier, puis par M. Whelan, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse, soutenue parNDC Health Corp., anciennement National Data Corp., établie à Atlanta, Géorgie (États-Unis), représentée initialement par MM. I. Forrester, QC, F. Fine, solicitor, Mes C. Price et A. Gagliardi, avocats, puis par Mes Price, J. Bourgeois, avocats, et M. Fine, enfin par M. Fine,parNDC Health GmbH & Co. KG, établie à Bad Camberg (Allemagne), représentée initialement par MM. I. Forrester, QC, F. Fine et M. Powell, solicitors, Mes C. Price et A. Gagliardi, avocats, puis par M. Fine, Mes Price et J. Bourgeois, avocats, enfin par M. Fine, et parAzyX Deutschland GmbH Geopharma Information Services, établie à Neu-Isenburg (Allemagne), représentée initialement par Mes G. Vandersanden, L. Levi et D. Dugois, avocats, puis par Mes Vandersanden et Levi,
parties intervenantes,
ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 2002/165/CE de la Commission, du 3 juillet 2001, relative à une procédure d'application de l'article 82 CE (Affaire COMP D3/38.044 – NDC Health/IMS Health : mesures provisoires) (JO 2002, L 59, p. 18),
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),
composé de MM. M. Vilaras, président, F. Dehousse et D. Šváby, juges,
greffier : M. H. Jung,
rend la présente
Ordonnance
Antécédents du litige
1 IMS Health, Inc. (ci-après « IMS »), société de droit américain, offre dans plusieurs pays des services d’information aux entreprises des secteurs des produits pharmaceutiques et des soins de santé.
2 En Allemagne, IMS exerce ses activités par l’intermédiaire de sa filiale IMS Health GmbH & Co. OHG. Elle fournit aux laboratoires pharmaceutiques intéressés un service de données relatives aux ventes régionales. Ce service est fondé sur une structure modulaire dénommée « structure à 1 860 modules », qui correspond à un découpage du territoire allemand en 1 860 zones géographiques servant à l’établissement de données sur les ventes de médicaments.
3 Considérant que certaines sociétés – en l’occurrence Pharma Intranet Information AG (ci-après « PII ») et AzyX Deutschland GmbH Geopharma Information Services (ci-après « AzyX ») – utilisaient des reproductions de la structure à 1 860 modules, IMS a intenté des procédures judiciaires pour atteinte à son droit d’auteur devant le Landgericht Frankfurt-am-Main (ci-après le « Landgericht Frankfurt »). Ces procédures ont été engagées le 26 mai 2000 à l’encontre de PII et le 22 décembre 2000 à l’encontre d’AzyX.
4 Par ordonnance du 12 octobre 2000, le Landgericht Frankfurt a interdit à PII d’utiliser la structure à 1 860 modules. Par ordonnance du 27 octobre 2000, confirmée par jugement du 16 novembre 2000, le Landgericht Frankfurt a interdit à PII d’utiliser aussi les structures à 2 847 ou à 3 000 modules, ou tout autre structure de ce type dérivée de la structure à 1 860 modules. L’ordonnance du 12 octobre 2000 et le jugement du 16 novembre 2000 ont été confirmés respectivement les 17 septembre 2002 et 19 juin 2001, par l’Oberlandesgericht Frankfurt-am-Main (ci-après l’« Oberlandesgericht Frankfurt »).
5 Après l’acquisition de PII par NDC Health Corp. (anciennement National Data Corp.), société de droit américain (ci-après « NDC ») qui exerce désormais ses activités en Allemagne par l’intermédiaire de sa filiale NDC Health GmbH & Co. KG, la même interdiction a été faite à NDC par ordonnance du 28 décembre 2000 du Landgericht Frankfurt, confirmée par jugement du 12 juillet 2001.
6 Par ordonnance du 28 décembre 2000, le Landgericht Frankfurt a également interdit à AzyX de fournir, de mettre sur le marché ou de proposer des données fondées sur la structure à 1 860 modules. Le Landgericht Frankfurt a confirmé cette ordonnance par jugement rendu le 15 février 2001.
7 Parallèlement à ces procédures judiciaires, NDC et AzyX ont demandé une licence à IMS en vue de l’utilisation de la structure à 1 860 modules, en contrepartie d’une redevance. IMS a refusé d’accéder à ces demandes, respectivement les 28 novembre 2000 et 28 mai 2001.
8 C’est dans ce contexte que NDC a introduit une plainte, le 19 décembre 2000, auprès de la Commission, sur le fondement de l’article 82 CE.
9 Le 3 juillet 2001, à la suite de cette plainte, la Commission a adopté la décision 2002/165/CE relative à une procédure d’application de l’article 82 CE (Affaire COMP D3/38.044 – NDC Health/IMS Health : mesures provisoires) (JO 2002, L 59, p. 18, ci-après la « décision attaquée »).
10 Dans cette décision, la Commission a conclu qu’il existait une présomption de comportement abusif, au sens de l’article 82 CE, dans la mesure où IMS refusait de concéder une licence d’utilisation de la structure à 1 860 modules. Par ailleurs, la Commission concluait à une probabilité de préjudice grave et irréparable pour l’intérêt général. Elle a relevé à cet égard que les concurrents d’IMS, à savoir NDC et AzyX, risquaient de se retirer du marché allemand si des licences ne leur étaient pas concédées.
11 Pour ces raisons, la Commission a décidé d’adopter des mesures provisoires prenant la forme d’une injonction adressée à IMS d’accorder sans délai et sur une base non discriminatoire, à toutes les entreprises présentes sur le marché des services de fourniture de données sur les ventes régionales en Allemagne, une licence d’utilisation de la structure à 1 860 modules.
Procédure et conclusions des parties
12 Le 6 août 2001, IMS a introduit, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, un recours en annulation contre la décision attaquée.
13 Par acte séparé déposé le même jour au greffe du Tribunal, IMS a également demandé, en vertu des articles 242 CE et 243 CE, que soit ordonné le sursis à l’exécution de la décision attaquée tant que le Tribunal n’aurait pas statué sur le recours au principal.
14 Par ordonnance du 10 août 2001, adoptée en vertu de l’article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, le juge des référés a suspendu à titre conservatoire l’exécution de la décision attaquée jusqu’à ce qu’il soit statué sur la demande de mesures provisoires (ordonnance du président du Tribunal du 10 août 2001, IMS Health/Commission, T‑184/01 R, Rec. p. II‑2349).
15 Par ordonnance du 26 octobre 2001, le président du Tribunal a suspendu l’exécution de la décision attaquée (ordonnance du président du Tribunal du 26 octobre 2001, IMS Health/Commission, T‑184/01 R, Rec. p. II‑3193). Sur pourvoi de NDC, cette ordonnance a été confirmée par ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2002, NDC Health/IMS Health et Commission [C‑481/01 P(R), Rec. p. I‑3401].
16 Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 5 février 2002, AzyX, NDC et NDC Health GmbH & Co. KG ont été admises à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.
17 Par ordonnance du 26 septembre 2002, le président de la troisième chambre du Tribunal a suspendu la procédure dans la présente affaire jusqu’à ce que la Cour statue sur les questions préjudicielles relatives à l’interprétation de l’article 82 CE posées par le Landgericht Frankfurt, dans le cadre des procédures judiciaires pendantes en Allemagne et opposant IMS à NDC.
18 Le 13 août 2003, la Commission a adopté la décision 2003/741/CE relative à une procédure d’application de l’article 82 CE (Affaire COMP D3/38.044 – NDC Health/IMS Health : mesures provisoires) (JO L 268, p. 69, ci‑après la « d