AFFAIRE COLACO MESTRE ET SCI - SOCIEDADE INDEPENDENTE DE COMUNICACAO, S.A. c. PORTUGAL
Karar Dilini Çevir:

 

 

ANCIENNE DEUXIÈME SECTION

 

 

AFFAIRE COLAÇO MESTRE ET

SIC – SOCIEDADE INDEPENDENTE DE COMUNICAÇÃO, S.A. c. PORTUGAL

 

 

(Requêtes nos 11182/03 et 11319/03)

 

 

 

ARRÊT

 

 

STRASBOURG

 

 

26 avril 2007

 

 

DÉFINITIF

 

26/07/2007

 

 

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l'affaire Colaço Mestre et SIC – Sociedade Independente de Comunicação, S.A. c. Portugal,

La Cour européenne des Droits de l'Homme (ancienne deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

MM.J.-P. Costa, président,
I. Cabral Barreto,
K. Jungwiert,
V. Butkevych,
M. Ugrekhelidze,
MmesA. Mularoni,
E. Fura-Sandström, juges,
et de Mme S. Dollé, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 18 octobre 2005 et 27 mars 2007,

Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date :

PROCÉDURE

1. A l'origine de l'affaire se trouvent deux requêtes (nos 11182/03 et 11319/03) dirigées contre la République portugaise et dont un ressortissant de cet Etat, M. José Manuel Colaço Mestre, et une société anonyme de droit portugais, SIC – Sociedade Independente de Comunicação (« les requérants »), ont saisi la Cour les 28 mars 2003 et le 31 mars 2003, respectivement, en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Les requérants sont représentés par Me C. Botelho Moniz et Me E. Maia Cadete, avocats à Lisbonne. Le gouvernement portugais (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. J. Miguel, procureur général adjoint.

3. Les requérants alléguaient que leur condamnation du chef de diffamation par voie de presse avait porté atteinte à l'article 10 de la Convention.

4. La chambre a décidé de joindre les requêtes (article 42 § 1 du règlement).

5. Par une décision du 18 octobre 2005, la chambre a déclaré les requêtes recevables.

6. Tant les requérants que le Gouvernement ont déposé des observations écrites complémentaires (article 59 § 1 du règlement). La chambre a décidé après consultation des parties qu'il n'y avait pas lieu de tenir une audience consacrée au fond de l'affaire (article 59 § 3 in fine du règlement).

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE

7. Le premier requérant est né en 1964 et réside à Queluz (Portugal). La deuxième requérante est une société anonyme ayant son siège à Oeiras (Portugal). Le premier requérant est journaliste de la deuxième requérante, laquelle est la propriétaire de la chaîne nationale généraliste de télévision SIC.

A. L'interview litigieuse

8. Au cours de l'année 1996, un débat public eut lieu dans la presse concernant l'éventuelle corruption des arbitres des matchs de football au Portugal. Dans ce contexte, une réunion eut lieu à Amsterdam, le 20 novembre 1996, entre la direction de l'UEFA (l'Union des Associations européennes de football) et le président de la Fédération portugaise de football. Le premier requérant était à Amsterdam en tant qu'envoyé spécial de la deuxième requérante.

9. Le 21 novembre 1996, le premier requérant interviewa M. Gerhard Aigner, à l'époque directeur général de l'UEFA. L'entretien porta, entre autres sujets, sur la situation du football portugais, s'agissant surtout des accusations de corruption des arbitres, et l'action de M. J. Pinto da Costa, à l'époque président de la Ligue portugaise de football professionnel, entité organisatrice du championnat professionnel de football, ainsi que du club de football Futebol Clube do Porto (« le FC Porto »).

10. La transcription de l'extrait de l'entretien en cause dans la présente affaire, qui eut lieu en français, se lit ainsi (R. est le requérant et A. est M. Aigner) :

« R. : Le président de la Ligue [portugaise] est en même temps le président d'un grand club.

A. : Vous parlez du président du FC Porto ?

R. : Oui, il est en même temps président de la Ligue et patron des arbitres et tous les dimanches il est assis sur le [banc] des joueurs.

A. : Je ne pense pas qu'il ait intérêt à prendre la place des joueurs, mais c'est inévitable que le président de la Ligue soit présent lors des matchs de son club ; mais que cela ait des répercussions sur l'action des arbitres sur le terrain (...) je pense que si on commence à faire des réflexions pareilles, le football ne pourra plus continuer son activité.

R. : Je vous donne un exemple : [dans] sa condition de président du FC Porto, le même président de la Ligue a insulté publiquement, l'année dernière, deux arbitres dans deux matchs que son club n'a pas [gagnés]. [Est-ce] normal ?

A. : Je connais pas mal de situations identiques dans lesquelles le président d'une Ligue est en même temps président d'un club ; ou dans lesquelles c'est un [organe] de la Ligue qui désigne les arbitres ou même des cas où des décisions disciplinaires sont prises par des [organes] de la Ligue ; donc ce n'est pas un cas isolé. »

11. L'entretien fut diffusé le 22 novembre 1996, dans l'émission de la SIC Os donos da bola (les maîtres du ballon). Cette émission de grande écoute portait exclusivement sur le football portugais. Elle était présentée par un autre journaliste de la deuxième requérante, et y participaient trois commentateurs qui étaient, d'après la deuxième requérante, des représentants non officiels des trois grands clubs portugais de football, dont le FC Porto.

B. La procédure pénale

12. A une date non précisée courant 1999, M. Pinto da Costa déposa devant le parquet de Porto une plainte pénale avec constitution d'assistente (auxiliaire du ministère public) contre le premier requérant et trois autres journalistes de la deuxième requérante (le présentateur de l'émission, le directeur des sports et le directeur de programmes), qu'il accusait d'avoir commis l'infraction de diffamation par voie de presse (abuso de liberdade de imprensa). Il déposa par ailleurs une demande en dommages et intérêts contre les personnes visées par la plainte et contre la deuxième requérante. Le ministère public soutint la plainte.

13. Le tribunal criminel de Porto, par un jugement rendu à une date non précisée, jugea le premier requérant coupable de l'infraction en cause et le condamna au paiement d'une amende de 260 000 escudos portugais (PTE) ou, en alternative, à 86 jours d'emprisonnement. Il condamna par ailleurs les deux requérants, solidairement, au paiement de 800 000 PTE à M. Pinto da Costa à titre de dommages et intérêts. Le tribunal relaxa les autres accusés. Il considéra notamment comme établi que le premier requérant avait insinué avec ses questions que M. Pinto da Costa contrôlait les arbitres portugais, alors même que la Ligue disposait d'une commission d'arbitrage indépendante de son président, ce qui était de la connaissance du premier requérant. Pour le tribunal, cette position du requérant était diffamatoire. Le tribunal considéra également établi que M. Pinto da Costa n'avait pas insulté les arbitres en cause, l'affirmation du premier requérant à cet égard étant donc, elle aussi, diffamatoire. Le tribunal considéra enfin établi que le requérant avait prétendu avec ses questions non pas informer mais uniquement formuler une attaque basse contre M. Pinto da Costa, le présentant comme une personne exécrable auprès des instances internationales du football.

14. Les requérants interjetèrent appel devant la cour d'appel de Porto, alléguant notamment la violation de leur droit à la liberté d'expression, garanti par l'article 10 de la Convention. Ils soulignèrent la situation d'intense débat public concernant le football qui se vivait à l'époque. Ils firent notamment valoir que le premier requérant s'était borné à faire usage de son droit de transmettre des informations, se fondant, pour la formulation des questions litigieuses, sur des faits confirmés et largement répandus dans la presse nationale, l'infraction relevée ne se trouvant donc pas constituée. Dans son avis sur le bien-fondé du recours, le procureur général adjoint près la cour d'appel soutint, se référant notamment à la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, que l'appel devait être accueilli.

15. Par un arrêt du 2 octobre 2002, la cour d'appel rejeta le recours et confirma la décision entreprise. Soulignant que le droit à la liberté d'expression n'est pas illimité, elle estima que la formulation des questions incriminées par le premier requérant était diffamatoire, l'infraction en cause étant donc constituée. La cour d'appel s'exprima notamment ainsi :

« Dans le cas d'espèce, le [premier requérant], se référant à l'assistente alors qu'il parlait au [directeur général de l'UEFA], a dit que ce même assistente était en même temps président de la Ligue et patron des arbitres et qu'il s'asseyait tous les dimanches sur le banc des joueurs ; le [premier requérant] accuse ensuite l'assistente d'avoir eu un comportement insultant envers les deux arbitres qui ont sifflé des matchs perdus par le FC Porto. Comme le dit le jugement attaqué, lorsque l'interview en cause passe sur une émission télévisée (...), elle est également regardée par des personnes qui ne maîtrisent ni les règles ni le fonctionnement des institutions qui régissent le football ; ces personnes pourront ne pas savoir que le président de la Ligue n'a aucun pouvoir concret et institutionnel sur le choix, le classement et l'action des arbitres (...). Ainsi, lorsque le [premier requérant] se réfère à l'assistente en tant que patron des arbitres (...) il le fait intentionnellement et de façon à créer des doutes chez l'interviewé, ainsi que chez tous les téléspectateurs, sur le comportement de l'assistente, qui aurait l'intention de bénéficier son propre club (...). D'autre part, lorsque le [premier requérant] impute à l'assistente un comportement insultant envers les deux arbitres qui ont sifflé des matchs perdus par le FC Porto, sans réussir à prouver l'existence de tels insultes, cela donne lieu à ce que des personnes ayant visionné l'interview aient des doutes ou soupçonnent l'assistente de ne pas avoir un comportement honnête et éthique, utilisant illégitimement sa position de président de la Ligue afin d'influencer les résultats des matchs de football en faveur de son club.

(...)

Il est donc indéniable que le [premier requérant] avait, lorsqu'il faisait l'interview en question, conscience du fait qu'il mettait en cause l'honneur et la réputation de l'assistente (...). »

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

A. Le droit pénal

16. L'article 180 du code pénal, concernant la diffamation, était ainsi libellé :

« 1. Celui qui, s'adressant à des tiers, accuse une autre personne d'un fait, même sous la forme d'un simple soupçon, ou qui formule, à l'égard de cette personne, une opinion portant atteinte à son honneur et à sa réputation, ou qui reproduit une telle accusation ou opinion, sera puni d'une peine de six mois d'emprisonnement ou d'une peine pouvant aller jusqu'à 240 jours-amendes.

2. La conduite n'est pas punissable :

a) lorsque l'accusation est formulée en vue d'un intérêt légitime ; et

b) si l'auteur prouve la véracité d'une telle accusation ou s'il a des raisons sérieuses de la croire vraie de bonne foi.

(...)

4. La bonne foi mentionnée à l'alinéa b) du paragraphe 2 est exclue lorsque l'auteur n'a pas respecté son obligation imposée par les circonstances de l'espèce, de s'informer sur la véracité de l'accusation.

(...) »

L'article 183 § 2 du code pénal aggrave les peines encourues jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 120 jours amende minimum pour les infractions surcommises par voie de presse.

B. Autre législation

17. La loi de la presse applicable au moment où le jugement a été rendu (loi no 2/99 du 13 janvier 1999) renvoyait la punition de la diffamation par voie de presse à la législation pénale applicable (article 30).

18. La loi concernant les opérateurs de télévision applicable au moment des faits (loi no 58/90 du 7 septembre 1990) disposait, dans son article 41, que les actes punissables surcommis par voie de la télévision seraient sanctionnés aux termes de la loi de la presse. Cette disposition prévoyait également que l'opérateur de télévision serait civilement responsable au même titre que l'auteur de l'infraction, solidairement.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 10 DE LA CONVENTION

19. Les requérants estiment que la condamnation du chef de diffamation dont ils ont fait l'objet porte atteinte à leur droit à la liberté d'expression, garanti par l'article 10 de la Convention, qui dispose :

« 1. Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. (...)

2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique (...), à la protection de la réputation ou des droits d'autrui (...). »

A. Thèses des parties

20. Les requérants soutiennent que leur condamnation au pénal ne saurait être considérée comme nécessaire dans une société dém

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