TROISIÈME SECTION
DÉCISION
SUR LA RECEVABILITÉ
Trois requêtes présentées contre la Turquie par
no 44766/98no 44771/98no 44772/98
Kazım KANİOĞLUSebahattin ARCASOYMehmet Selim ARAS
La Cour européenne des Droits de l'Homme (troisième section), siégeant le 13 mai 2004 en une chambre composée de :
MM.G. Ress, président,
I. Cabral Barreto,
L. Caflisch,
R. Türmen,
J. Hedigan,
K. Traja,
MmeA. Gyulumyan, juges,
et de M. V. Berger, greffier de section,
Vu les requêtes susmentionnées introduites devant la Commission européenne des Droits de l'Homme les 2 et 4 mai, et 27 mars 1998,
Vu l'article 5 § 2 du Protocole no 11 à la Convention, qui a transféré à la Cour la compétence pour examiner les requêtes,
Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par les requérants,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
Les requérants, MM. Kazım Kanioğlu, Sebahattin Arcasoy et Mehmet Selim Aras, sont des ressortissants turcs, les deux premiers nés en 1937 et le troisième en 1947. Ils résident tous à Mardin. Ils sont représentés devant la Cour par Mes Meral et Mesut Beştaş, avocats à Diyarbakır.
A. Les circonstances de l'espèce
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.
1. de la requête no 44766/98
Le requérant travailla au service d'entretien de la ville de Mardin (ci-après « la ville ») du 19 février 1972 au 10 janvier 1997.
Par un arrêté du conseil municipal du 21 février 1997, le requérant fut mis à la retraite. La ville décida de lui verser une indemnité complémentaire de départ à la retraite (« indemnité complémentaire »), constituée des indemnités d'ancienneté et de préavis, d'un montant de 1 913 110 000 livres turques (TRL).
La ville ne versa pas cette indemnité complémentaire.
Le 19 décembre 1997, le requérant entama une procédure d'exécution forcée contre la ville pour que lui soit versée l'indemnité complémentaire, à savoir la somme de 5 538 309 500 TRL.
Le 29 décembre 1997, le juge de l'exécution assortit la somme réclamée d'un taux d'intérêt de 30 %.
Le 27 janvier 1998, le juge de l'exécution ordonna la levée de la saisie pratiquée sur les comptes bancaires de la ville.
Le 14 novembre 2000, la ville versa au requérant l'indemnité complémentaire de 5 538 309 500 TRL, assortie d'un intérêt moratoire de 30 % l'an.
2. Requête no 44771/98
Le requérant travailla en qualité de conducteur d'autobus à la ville de Mardin du 2 décembre 1972 au 13 août 1996.
Par un arrêté du conseil municipal du 27 août 1996, le requérant fut mis à la retraite. La ville décida de lui verser une indemnité complémentaire de départ à la retraite de 1 267 778 543 TRL, constituée de l'indemnité d'ancienneté et de préavis.
La ville ne versa pas cette indemnité complémentaire.
Le 19 décembre 1997, le requérant entama une procédure d'exécution forcée contre la ville.
Par une lettre du 2 juillet 2001, le requérant informa le greffe de la Cour que, le 16 novembre 2000, la ville lui avait payé l'indemnité complémentaire de 3 091 076 507 TRL, assortie d'un intérêt moratoire de 30 % l'an.
3. Requête no 44772/98
Le requérant travailla comme « employé des entrepôts » à la ville de Mardin du 13 décembre 1979 au 13 mai 1997.
Par un arrêté du conseil municipal du 13 mai 1997, le requérant fut mis à la retraite. La ville décida de lui verser une indemnité complémentaire de départ à la retraite, dont le montant n'est pas précisé, constituée de l'indemnité d'ancienneté et de préavis.
La ville ne versa pas cette indemnité complémentaire.
Le 19 décembre 1997, le requérant entama une procédure d'exécution forcée contre la ville.
Le 27 janvier 1998, le juge de l'exécution ordonna la levée de la saisie pratiquée sur les comptes bancaires de la ville.
Par une lettre du 2 juillet 2001, le requérant informa le greffe de la Cour que, le 16 novembre 2000, la ville lui avait payé l'indemnité complémentaire de 5 815 961 094 TRL, assortie d'un intérêt moratoire de 30 % l'an.
B. Le droit interne pertinent
En vertu de l'article 82 de la loi no 2004 du 9 juin 1932 sur les voies d'exécution et la faillite (Icra ve Iflas Kanunu) et de l'article 19 de la loi no 1530 du 3 avril 1930 sur les communes (Belediyeler Kanunu), les biens appartenant à l'Etat et aux communes ainsi que les biens destinés à l'usage public ne peuvent faire l'objet d'une saisie (voir Gaganuş et autres c. Turquie, no 39335/98, § 18, 5 juin 2001).
GRIEFS
Invoquant l'article 1 du Protocole no 1, les requérants se plaignent du retard pris par la ville dans le paiement des indemnités complémentaires de départ à la retraite et de l'insuffisance du taux de l'intérêt moratoire appliqué aux dettes de l'Etat.
Invoquant les articles 6 et 13 de la Convention, ils se plaignent de n'avoir pas disposé en droit interne de voie de recours efficace pour contraindre la ville à leur verser leurs indemnités complémentaires.
EN DROIT
1. Les requérants se plaignent du retard pris par la ville dans le paiement des indemnités complémen